Le Grdr, en partenariat avec la Cité des métiers et la Région Ile-de-France, a animé le 27 mars dernier le séminaire professionnel « Entrepreneurs d’ici & d’ailleurs : De la trajectoire migratoire à l’accompagnement entrepreneurial  ».
La journée a été riche en échanges grà¢ce à la présence d’acteurs variés essentiels au processus de création d’entreprise : des professionnels de l’accompagnement, des chercheurs, des réseaux associatifs de la diaspora, des institutionnels et évidemment des entrepreneurs migrants. Les objectifs étaient de débattre des difficultés du parcours entrepreneurial, de partager ses expériences, mais aussi de trouver collectivement des éléments de réponses en s’échangeant de bonnes pratiques.
Table ronde n°1 : « L’analyse sémantique, sociologique et historique de l’immigration pour éclairer la problématique de l’entreprenariat migrant  »
Dans un premier temps, Clemens Zobel, maître de conférences à l’Université Paris VIII, a mis en avant l’articulation entre la dynamique des entrepreneurs migrants et l’engagement associatif, soulignant plusieurs évolutions. Tout d’abord, les femmes et les personnes diplômées sont de plus en plus présentes dans ces domaines. Ensuite, l’engagement découle plutôt désormais d’un intérêt individuel très important alors qu’auparavant il s’agissait plus d’une « dette  » vis-à -vis de la cité. Dans cette nouvelle configuration, l’engagement peut être par conséquent un tremplin pour l’emploi. Ensuite, Thierry Levy-Tadjine, également maître de conférences à l’Université Paris VIII, a souligné que les transformations de l’entreprenariat étaient parfois difficiles à intégrer pour les structures d’accompagnement. Ainsi, face à un entreprenariat plus ouvert aux étrangers et aux projets transnationaux, les professionnels doivent adapter les dispositifs à ce public. L’accompagnement ne doit plus être vu comme seulement technique, mais aussi parfois social pour faire face aux problématiques d’interculturalité o๠un arbitrage entre la culture de la société d’accueil et celle d’origine.
Table ronde n°2 : « Réalités de l’entreprenariat migrant et pratique d’accompagnement  »
Jonathan Stebig, responsable du Pôle insertion-Entreprenariat au Grdr, a signalé que les personnes migrantes font face à un déclassement social et professionnel en France malgré de véritables compétences et connaissances acquises dans le pays d’origine. D’o๠la nécessité de mettre en place des dispositifs sur le long terme, de comprendre comment le projet migratoire influe sur le projet économique et de le valoriser. L’occasion pour Mamita Ignacio Pinto de témoigner, elle qui a été accompagnée par le Grdr et a développé avec succès sa marque de prêt-à -porter, dans le but « de sortir du soi-disant folklore en portant du tissu Wax  » et de rendre visible les artisans sénégalais. Divers entrepreneurs ont mis en perspective les propos de la matinée et partager leur histoire, empreinte de caractéristiques communes : des projets à fort potentiel en lien avec leur territoire d’origine mais qui pourtant rencontrent des difficultés structurelles et financières. Mais quand est-il de la situation ailleurs ? Anna Bellan à elle insisté sur le contexte particulièrement favorable aux entrepreneurs migrants au Royaume-Uni grà¢ce à un solide tissu associatif et à une fiscalité libérale qui simplifie les choses. Elle ajoute également que si les entrepreneurs sont de plus en plus nombreux en Europe, c’est d’une part dà » à la volonté de créer soit même son emploi face à une exclusion sociale institutionnelle mais aussi grà¢ce à une capacité de résilience très forte de la part de cette population.
Analyse des pratiques professionnelles et retours d’expériences
L’après-midi a ensuite laissé place à des ateliers axés sur l’accès aux financements, la maîtrise de la langue, et sur le potentiel économique et la structuration des projets transnationaux. Ces ateliers ont permis de dégager plusieurs axes pour les entrepreneurs issus de la migration. D’abord, à la nécessité de les confronter au regard extérieur, à déléguer certaines tà¢ches en se faisant accompagner, pour la recherche de financement, mais aussi pour renforcer ses propres compétences. Ensuite, si les projets transnationaux sont des défis permanents, ils sont également gage d’enrichissement et d’ouverture pour des entrepreneurs développant alors une vraie flexibilité interculturelle. Enfin, face au challenge de la maitrise de la langue et des codes socio-culturels d’un pays d’accueil, le projet d’entreprendre, le désir de le transmettre, peut finalement aussi être vu comme l’activateur d’une intégration et devenir un facteur de réussite.
Encourager le travail en réseau et renforcer les pratiques collaboratives
Pour conclure, la question de l’entreprenariat des migrants est complexe et délicate mais mérite d’être abordée. Ce séminaire a permis de s’interroger sur le type de modèle que nous voulons pour les entrepreneurs de demain mais aussi de renforcer les pratiques collaboratives et d’encourager les lieux de rencontres entre paires et accompagnateurs.
Depuis sa création, la migration est au cœur de l’engagement du Grdr. Au fil des années, l’association a spécifiquement développé des activités axées sur la promotion socio-professionnelle des migrants, notamment au travers de clubs comme « Dynamiques africaines  », « Entreprendre au féminin  » ou encore via l’Ecole régionale des projets. Ce séminaire s’inscrit donc dans la continuité des activités du Grdr et de son partenariat ancien et productif avec la Cité des métiers.